Bilan 2022 des salles et organisations de concerts du réseau Court-Circuit.

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L’année 2022 marque un tournant dans la reprise des activités culturelles en Belgique après les perturbations causées par la pandémie. Même si les conditions d’accès aux concerts étaient encore impactées jusque début mars, les salles et organisations de concerts, en particulier celles affiliées à l’asbl Court-Circuit, ont repris leurs activités avec un dynamisme important. Elles continuent cependant de faire face à des défis financiers et structurels.

 

Méthodologie et biais

Chaque année, l’asbl Court-Circuit mène une enquête auprès de ses membres pour dresser un état des lieux de la situation des salles et des organisations de concerts. Cette enquête est réalisée via un formulaire en ligne, accessible sur la plateforme Gimic. La participation à cette enquête est volontaire : les membres de la fédération choisissent de compléter le formulaire, généralement sur leur temps libre ou leur temps de travail.

 

L’enquête porte sur les données de l’année 2022, les résultats reflètent encore l’impact résiduel du Covid, notamment sur les activités du début de l’année. Les répondants incluent des structures très diverses, allant des petites et moyennes salles de concert aux organisations sans lieu fixe, en passant par des festivals. Ces structures sont parfois entièrement bénévoles ou emploient quelques salarié·es.

 

Il est également essentiel de préciser que les données fournies ne sont pas vérifiées dans le détail. Les méthodes de comptage peuvent varier d’une organisation à l’autre, ce qui peut introduire des biais dans la représentativité ou la comparabilité des résultats. Par conséquent, bien que l’enquête fournisse une image précieuse du secteur, elle doit être interprétée avec prudence, en tenant compte de la diversité des structures et des éventuelles disparités dans l’appréhension des questions et la collecte des données.

 

Une année riche en événements et concerts

 

D’après l’étude, 51 organisations ont répondu à l’enquête, représentant 71 % des membres du réseau. Ces organisations ont organisé un total de 1.661 événements, parmi lesquels 4.218 concerts. Ce chiffre impressionnant témoigne de la reprise d’activités après des mois d’incertitude.

 

 

Sur les 12.017 musicien·nes ayant performé en 2022, seulement 23% étaient des femmes, révélant un déséquilibre persistant en termes de genre sur scène.

 

 

Avec 271.251 entrées cumulées, le public a également retrouvé le chemin des salles de concert et festivals.

 

Des jauges variables et une répartition géographique marquée

Les jauges moyennes pour les salles de concerts s’élèvent à 458 personnes, avec une médiane de 250 (cela signifie que la moitié des salles de concerts ont une jauge d’au moins 250 personnes). Les festivals, quant à eux, attirent en moyenne 2.134 participants, avec une médiane de 1.500

 

D’un point de vue géographique, la répartition des organisations répondantes montre une forte concentration à Bruxelles (18 structures) et en province de Liège (13 structures), suivies du Hainaut (9 structures). Cela souligne l’importance de ces régions en tant que centres névralgiques de la culture musicale en Belgique francophone.

 

 

Diversité des activités et des types de structures

90% des organisations ne se limitent pas à l’organisation de concerts. Elles s’engagent également dans des activités annexes telles que des résidences artistiques, des conférences ou encore des expositions. Cela montre une volonté de diversification pour répondre à différents publics et générer de nouvelles sources de revenus.

 

 

Parmi les festivals, la moitié d’entre eux développent également des activités connexes, tandis que 30% des salles organisent des événements « temps fort » de type festival au cours de l’année. Cette diversification permet non seulement de capter un public plus large, mais également de renforcer le rôle des structures dans la vie culturelle locale.

 

 

 

 

Un réseau de soutien à la scène locale

 

 

Les membres de Court-Circuit sont une pierre angulaire de la diffusion et du développement des projets musicaux issus de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Avec une programmation composée à 65% d’artistes FWB contre 25% de groupes internationaux et presque 10% de projets flamands, on constate que l’intérêt des programmateur·rices est principalement porté sur nos artistes locaux. On peut également déduire que les projets émergents sont mis en avant sur nos scènes.

 

 

 

 

Une forte dépendance aux subventions pour stabiliser l’emploi

L’un des constats majeurs de cette étude est la dépendance des organisations de concerts aux subventions publiques pour sécuriser les emplois. En effet, les subventions représentent 43,4% des revenus totaux, un chiffre presque équivalent aux dépenses liées à l’emploi (45,1%). Cela démontre que sans ces aides publiques, il serait difficile de maintenir des emplois stables dans ce secteur.

 

 

Les revenus totaux des organisations s’élèvent à 9,34 millions d’euros pour 9,05 millions d’euros de dépenses, ce qui montre une gestion serrée des ressources financières. Cependant, cette dépendance à l’aide publique expose également ces structures à des risques en cas de réduction des financements futurs.

 

 

 

 

Une répartition des effectifs bien spécifique

Dans le graphique suivant, on peut déduire que pour les salles et les organisations sans lieu fixe (OSLF), près de 32% des employé·es sont rémunéré·es et réalisent environ 77% du travail compté ici en équivalents temps pleins (ETP).

Les 9% d’employé·es permanent·es réalisent 57% du travail et les 23% d’employé·es externes réalisent près de 20% des heures de travail.

Les 58% de bénévoles et les 10% d’autres employé·es non rémunéré·es (stagiaires, etc.) quand à eux, réalisent 23% des heures de travail.

 

Pour les festivals, la tendance varie. On dénombre beaucoup plus de bénévoles et d’employé·es externes (on pense par exemple à l’emploi de technicien·nes en renfort). Mais les équipes rémunérées continuent à effectuer près de du travail.

 

Un manque de représentativité de genres

Si les femmes représentent 42% des équipes permanentes, leur présence diminue dans les engagements externes (24%), ainsi que sur scène, où elles ne sont que 23% de musiciennes. Scivias faisait le même constat dans son rapport de 2022. Là, les femmes représentaient 21% des artistes programmé·es au sein des festivals analysés. Par ailleurs, ces chiffres concordent assez bien avec la répartition genrée des candidatures reçues aux derniers Concours Circuit. En effet en 2022, nous dénombrions 18,4% de candidatures de groupes identifiés comme « féminins » selon la méthode de comptage de Scivias. Il est donc urgent de rendre les scènes du réseau plus attrayantes et accessibles aux artistes sous-représenté·es. 

On analyse par ailleurs Cette sous-représentation des femmes est également visible dans les postes à responsabilité : Nous avons analysé les équipes de 21 structures et les hommes y occupent 93% des postes de direction et 88% des postes techniques quand les femmes occupent principalement des postes administratif ou dans la communication.

Une analyse croisée avec les catégories d’âge par type de poste permet de faire ressortir des profils types par catégorie de poste:

  • Direction – hommes de plus de 35 ans.
  • Direction artistique – profils entre 25 et 44 ans.
  • Production – profils plus jeunes de moins de 25 ans à 44 ans.
  • Communication – Femmes de 25 à 44 ans.
  • Administration – Femmes de 35 à 44 ans.
  • Technique – Hommes de 25 à 44 ans.
  • Catering / Bar – Hommes et femmes de moins de 45 ans.
  • Autres (agents d’entretien, accueil…) – Hommes et femmes de tout âge.
  • Un seul poste entièrement dédié à la médiation est identifié.

En termes de représentativité, moins de 1 % des personnes sur scène sont identifiées par les répondants comme appartenant à des identités de genre sous-représentées, et seulement 1,5 % des emplois rémunérés concernent des personnes issues de ces groupes. Ces chiffres révèlent un manque de diversité au sein des organisations de concerts, tant sur scène que dans les équipes, ce qui constitue un défi pour les années à venir.

Salles de concerts, organisations sans lieu fixe et festivals: des dynamiques différentes

Les festivals semblent plus vulnérables financièrement que les salles de concerts. En effet, bien que les festivals attirent un plus grand nombre de spectateurs, leurs dépenses dépassent légèrement leurs revenus, avec 1,52 million d’euros de dépenses contre 1,49 million d’euros de recettes. En revanche, les salles de concert parviennent à mieux équilibrer leurs finances.

 

Cela peut s’expliquer par les coûts organisationnels plus élevés pour les festivals (logistique, artistes internationaux, assurances, etc.), combinés à une dépendance accrue à la fréquentation et aux subsides.

 

Les organisations sans lieu fixe quant à elles, ont une toute autre façon de fonctionner. Avec 1% d’employé·es permanent·es, 5% d’employé·es externes contre 93% de bénévoles et 1% d’autres travailleur·reuses non rémunéré·es, leurs réalités sont bien différentes. Évidemment, les dépenses dédiées à l’emploi sont diminuées ce qui laisse une part plus importante aux dépenses artistiques (toute proportion gardée). Les organisations sans lieu fixe perçoivent moins de subsides et assez peu de recettes bar (puisqu’elles sont souvent accueillies dans des lieux qui gardent la gestion du bar). Elles doivent donc compter principalement sur la vente de tickets.

 

Conclusion

Même si les premiers mois de l’année 2022 étaient encore impactés par les limitations dues à la pandémie de Covid-19, le réseau d’organisations de concerts membres de Court-Circuit a marqué un retour significatif à la normale. Toutefois, des défis majeurs persistent, notamment en termes de diversité, de représentativité de genre, et de dépendance aux subventions publiques. Alors que le secteur continue de se redresser, ces organisations devront naviguer avec soin entre la nécessité de maintenir des emplois et de diversifier leurs activités pour assurer une stabilité à long terme.

Découvrir le rapport complet en PDF : Chiffres 2022 Membres Court-Circuit

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10 décembre 2024

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Martin Hellinckx

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