.17 octobre 2017
Par David Salomonowicz

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Dossier de presse : vitrine et pied-de-biche

Projet de base ou base de tout projet, le dossier de presse est l’étape de « professionnalisation » indispensable à tout groupe ou tout artiste qui se lance dans le monde magique mais intrépide de la musique. Petit tour d’horizon en forme, en fond et (surtout) en erreurs de rookie à éviter.  

Voilà 15 mois que vous avez lancé votre trio, que vous avez répété 3 fois par semaines dans la cave de votre bassiste et que vous avez joué à quelques reprises dans une arrière-salle ou en ouverture d’un petit festival. Il est temps pour vous de faire grandir le groupe, de passer à un stade supérieur et de montrer à tout le monde ce que vous avez dans les amplis. Un·e de vos ami·e·s ingénieur·e du son vous a aidé à produire 5 morceaux qui tiennent la route à l’écoute et l’oncle Bernard a même mis la main à la poche pour financer du studio pour l’enregistrement et louer du matos pour le tournage du clip du single.

Tout est fin prêt, mais c’est maintenant qu’arrive le plus compliqué…

Comment faire connaître le projet ? Qui contacter ? Avec quoi ? Par quel biais ? Sous quelle forme ?

Autant de questions que 99 % des jeunes groupes ou artistes viennent à se poser au moment de tenter de braquer la banque.

Premièrement, hormis si l’oncle Bernard est vraiment d’humeur généreuse ou que chaque membre du groupe se cotise pour financer le pressage de cds promos, l’heure est plutôt à la débrouille et au DIY. La création d’un Bandcamp ou d’un Soundcloud plus tard, votre EP et ses 5 MP3 téléchargeables peuvent être lancés à la mer. Visible ou non du grand public, à votre choix et stratégie.

L’important pour vous est de vous faire remarquer par des auditeur·ice·s qui viendront un jour à vos concerts (ne pensez pas trop à vendre des cds ou des albums, ce temps-là est révolu) mais dans un premier temps, vous devez tenter d’attirer (sans harcèlement souvent très malvenu) l’oreille de professionnel·le·s du milieu. Journalistes, patron·ne·s de labels, bookers, attaché·e·s de presse et surtout, si vous voulez jouer, programmateur·ice·s. Pour ce faire, il vous faut d’une part fournir une musique de qualité, mais surtout qu’elle arrive d’une façon ou d’une autre à une de ces personnes du sacro-saint « Milieu ». Et souvent si c’est le cas pour une d’entre elles, les autres ne tarderont pas à être mis au courant et l’effet papillon (sonore) sera déclenché. Et bien souvent le pied-de-biche sera le dossier de presse.

Eviter les pièges : clichés, maquillage sous les yeux et namedropping

Comme dirait l’autre, pour donner l’envie d’avoir envie, mieux vaut sortir du lot tant les candidats aux lauriers sont légions. Le plus dur dans un dossier (de subvention comme de presse) est de réaliser ce subtil et on ne peut plus difficile numéro d’équilibriste entre information et originalité, entre mise en avant des atouts et indispensable humilité. Il s’agira aussi d’éviter les clichés par trop éculés comme les photos en forêt avec de la fumée, les clichés dans la pénombre, les logos conceptuels donc illisibles, les masques ou encore le maquillage indie(n) sous les yeux. A proscrire également, les formulations alambiquées afin de garder une part de mystère si bien que les phrases en deviennent incompréhensibles. Et enfin, veillez à honnir à jamais de tous vos textes le namedropping du style « Dans la veine de Bon Jovi… » ou « On nous compare souvent à Noir Désir ». C’est à 99 % le bâton pour vous faire badbuzzer !

Sans donner de formule magique toute faite (hormis vous conseiller vivement d’engager un·e – bon·ne – attaché·e de presse), tâchez pour être crédibles, d’être honnêtes et simples dans vos formulations de phrase. Rien ne sert de tenter d’épater la galerie avec une dissert’ de philo ou des jeux de mots tangents, mais optez plutôt pour des punchlines intelligentes et du jargon usuel (opus, éponyme, single, plage titulaire, release, sample,…). Il faut surtout présenter votre musique, les membres du projet, raconter une histoire, évoquer du réel, créer l’intérêt dans un océan submergé d’hameçons. Graphiquement, votre mise en page doit être agréable et fluide, sans esclandre fluo ou police de caractère déjantée, mais avec des couleurs agréables et lisibles, du matériel d’écoute facile à télécharger, des liens vers vos réseaux sociaux justes et actifs pour éviter les étapes superflues.    

La bio doit idéalement ne pas être trop longue (3 petits paragraphes), impeccable orthographiquement, soignée mais punk, originale mais sérieuse. Un condensé intelligible et sexy à la fois. Au final c’est la vitrine, le reflet et la concrétisation de votre travail artistique mais c’est tout un art de ne pas la bâcler et d’insérer le pied-de-biche.

Bonne chance, amis braqueur·euse·s !

David Salomonowicz,

Attaché de presse (agence Com As You Are) et responsable communication du Dour Festival